29 mars 2011

L'été magique

Depuis neuf jours il fait un temps déprimant. Les journées grises et neigeuses alternent avec celles où le soleil ne parvient pas à réchauffer un vent froid, aigre et sec. Tout cela favorise les longues expéditions sur le web. L'autre jour je me demandais ce qu'il restait de visuels de l'Expo 67. 

C'est que pour bien des québécois de mon âge c'est un souvenir un peu brumeux mais merveilleux. J'ai eu mes neuf ans dans cet été magique. Une fois la semaine, ma mère devait suivre des cours de mise à jour pour reprendre son métier d'infirmière, elle pouvait caser mes deux soeurs chez ma tante mais que faire des garçons ? Je ne sais trop comment elle a eu l'idée de nous offrir l'expo comme gardienne. 

Une fois par semaine nous partions donc de notre lointaine banlieue, seuls, moi et mon frère (10 ans), munis de notre lunch, des tickets de métro et d'autobus et de ce qu'il fallait pour payer l'entrée (1.25$). Des fois, il nous restait assez d'argent de poche pour nous payer les succulents sandwiches du pavillon scandinave, les moins chers du site servis avec des ustensiles de plastique au design ultramoderne.

On avait nos trucs pour couper les files interminables à l'entrée des pavillons: se faire passer pour les enfants d'une autre famille (risqué) ou mieux, entrer par la sortie. Combien de pavillons avons-nous-vus à l'envers ! Nous étions fascinés par les maquettes de toutes sortes elles abondaient chez les soviétiques étaient inexistantes chez les américains. Nous avons joué beaucoup dans le carré de sable  blanc du pavillon allemand, passions des heures à lire les Astérix et autres BD au pavillon de la France. Merveilleux souvenirs !

On trouve pas mal de traces de l'événement sur le web, beaucoup de prises de vues externes mais peu de choses de l'intérieur des pavillons. Imaginez donc ma joie de revoir un bout d'une visite du pavillon du téléphone, extraite d'une émission de radio canada qui étrennait la couleur cette année là: 



Ah que c'était moderne ! Il y avait même un visiophone ! Ce que l'extrait ne dit pas c'est que ce pavillon avait l'un des clous de l'expo, ce fameux film 360° qui célébrait le centenaire du Canada. 

Quand on voit toute la modernité que célébrait cet événement on est toujours surpris du contraste avec notre temps plus amer. Comme si le merveilleux a fait place à une sorte de saturation, d'overdose et se replie vers une nostalgie envahissante qui avale maintenant le passé en le restituant sous une forme insipide, stérile et bien pensante.

À croire qu'à force de restaurer, de ravaler il nous faudrait oublier que le monde a déjà été différent. 

27 mars 2011

Quand la droite délire

Je trouve un peu dommage que les médias ici aient peu repris cette histoire qui agite encore le paisible état du Wisconsin. On sait que son nouveau gouverneur, sous prétexte d’équilibre budgétaire, a voulu mettre fin aux droits syndicaux des employés de l’État considérés comme indument privilégiés (sauf bien sûr les flics et les pompiers!) . Vous avez sans doute vu le cirque qui en est découlé : manifs des employés qui occupent le capitole local, fuite des sénateurs démocrates pour empêcher le quorum et ainsi bloquer la loi que le gouverneur a réussi tout de même à faire adopter par une entourloupette procédurale. Notons également au passage que la situation financière du Wisconsin n’était pas assez critique pour empêcher que le même gouverneur Walker n’y diminue les impôts sur les entreprises.

En marge de ce débat, William Cronon, grand pionnier de l’histoire environnementale et professeur à l’université d’état du Wisconsin, y va d’une tribune publiée dans le New York Times. Il y souligne à quel point cet homme va complètement à l’encontre des traditions de cet État qui a été le seul à voter contre Reagan en 1984, quoiqu’il ait aussi engendré le sénateur McCarthy, ce qui en l’espèce, est  prémonitoire.

En réaction à cette tribune ou pas, voilà que le parti républicain du Wisconsin se prévaut de la très généreuse loi d’accès de l’information de l’état pour demander copie de tous les courriels que le professeur Cronon a envoyé de son compte à l’université et pouvant contenir des mots clés associés au conflit en cours. La manœuvre est grossière, il s’agit de décrédibiliser l’auteur en prouvant qu’il s’est servi des outils de son université publique à des fins partisanes.

La réaction du professeur est digne, il s’en explique dans un long message de son blogue que je vous invite à lire. Il y a là bien sur la notion de liberté académique, celle de la confidentialité du courrier etc. Inutile de dire les réactions indignées des milieux universitaires et bien sûr celle des républicains qui persistent et signent.

Là où la chose devient plus inquiétante, c’est qu’en faisant ses recherches le Pr. Cronon est tombé sur une association d’élus de droite qui vise à coordonner le passage d’une armada de lois visant un retour à un conservatisme économique pur et dur. En bon professeur, il a proposé une activité hautement pédagogique dans son blogue. Je vous invite à la suivre.

Que conclure de tout ça ? Tout d’abord, la contradiction fondamentale entre une droite qui hurle à l’État Léviathan et pour qui, par exemple, les recensements sont une invasion inacceptable de la vie privée et qui, en même temps, utilise des procédés pire que ceux qu’elle combat pour arriver à ses fins. Difficile en même temps de ne pas y voir une attaque concertée contre tous les mécanismes de l’état providence, contre l’état redistributeur de richesses bref contre tout ce qui avait pu rendre le capitalisme plus égalitaire et plus supportable à tous.

Et naïf qui pense que cela ne concerne que nos voisins du Sud. Les frontières sont poreuses aux idées, on en a un bon exemple au fédéral. 

P.S. Et contrairement à la plupart des blogueurs, j'ai lu son livre sur l'histoire environnementale de la Nouvelle-Angleterre ;-) C'est un ouvrage majeur et pionnier. 

26 mars 2011

Élections...

Bon, c'est confirmé nous serons en élections fédérales le 2 mai. Les lecteurs de ce blogue savent où je loge. Dans mon coin, disons que le résultat semble acquis. Mon député bloquiste que je connais un peu est assez effacé mais efficace, il est parfois étrange étant un des rares de son parti à avoir voté contre mariage gai tout en étant assez à gauche ailleurs. Depuis qu'il a succédé à un certain Jean Charest comme député de Sherbrooke ses majorités vont s'accroissant.

Au plan canadien, il est assez inquiétant de voir que les conservateurs sont près de la majorité. On le sait, la bataille va se jouer sur assez peu de comtés, ontariens pour la plupart et les marges seront minces. Au Québec, possible que les conservateurs perdent quelques sièges mais ils seront compensés par ce qu'il gagneront en banlieue de Toronto et dans les petites villes de l'Ontario.

Mais la campagne est jeune et j'espère bien qu'Ignatieff et les libéraux remontent un peu dans l'opinion canadian ou encore qu'on sache voter utile pour bloquer les conservateurs. C'est que ce parti que je n'ai jamais aimé fait tout pour devenir encore plus détestable. On sent qu'il se passe chez eux la même chose que chez les républicains américains, disparition des modérés au profit d'une droite ignorante et imbécile donc dangereuse. L'abolition du formulaire long du recensement est à cet égard typique de leur état d'esprit. Ajoutons-y la disparition des fonds de recherches sur les changements climatiques, une politique étrangère guerrière aveuglément pro-israélienne, un délire sécuritaire et pénal qui ne repose pas sur la réalité et vous avez là un parti qui prend ses paranoïas pour des réalités.

Et ils sont menteurs. Ce matin, Harper dénonçait l'idée même d'une coalition alors que lui même était prêt à s'allier au Bloc et au NPD pour prendre la place de Paul Martin en 2004 (remarquez que comme OVNI politique on n'aurait pas fait mieux: un alliance droite, gauche et souverainistes contre le centre-droit aurait été assez extraterrestre). C'est dire que cet homme est dangereux, prêt à tout pour parvenir à ses fins et qu'en fait «d'agenda caché», c'est toute une encyclopédie qu'il est prêt à nous passer.

Bien des choses ont le temps de se passer d'ici le 2 mai. Disons que pour le moment, j'ai surtout hâte que les bancs de neige fondent. l'hiver a joué cette semaine un rappel que personne n'a demandé. Comme la plupart des lois de M. Harper.

PS Pour suivre la campagne: réouverture du blogue de l'admirable Chantale Hébert et un bon site de cartographie électorale (en anglais, hélas!).

21 mars 2011

Chronique de la haine ordinaire

Embruns signale un certain malaise autour du site Vigile qui tente d'être un forum des souverainistes québécois. On l'accuse d'héberger des textes vaguement antisémites. Pour en avoir lu quelques uns, peut-être,  mais ils ne sont pas particulièrement intelligents plus maladroits qu'autre chose. Mais bon c'est un site bénévole qui survit autour d'une idée assez mal vue de nos jours.

Que l'accusation soit venue du Congrès juif canadien est normal, on les comprend d'être vigilants en ce domaine et Vigile devrait l'être un peu plus peut-être. Par contre, le vieux souverainiste que je suis en a marre de cette équation trop facile qu'on fait entre nationalisme et antisémitisme. Encore là c'est une procédé classique : diabolisons l'indépendantiste qui veut se replier sur lui même etc. etc. Toute une ancienne littérature anticolonialiste ( Frantz Fanon, Albert Memmi) a bien démonté ce mécanisme d'amalgame.


Tout ça me déprime un peu, alors dans ce cas je vautre dans les commentaires d'un quelconque grand quotidien canadien pour me rappeler que la bêtise est partagée dans les deux camps. Et comme je suis de mauvaise foi, je choisis le National Post:

Lets give Quebec the keys to its own country after the ROC (= Rest of Canada) determines how much land we need to ensure communication and transportation with the Maritimes, the continued use of the St. Lawrence Seaway as a fully National Canadian corridor, the return of lands loaned to Quebec in Ungava and then let them have at it among themselves.
(Si je comprends bien, il est gentil de nous laisser les Laurentides et le Saguenay) 
Only then will they find out they are a lazy, socialist society who have to finally pay their own way in the world.

I say this reluctantly as I love to visit the Province. It is not unlike having a child who needs to go out into the world and earm a living. Sometimes we have to kick them out. Only then do they understand there are no free rides and they might then appreciate their parents moreso.
 I'm tired of being Quebec's parental unit. Let's kick them out
.
 J'aime bien ce paternalisme sévère du Canada, qui est si gentil de nous avoir laissé habiter leur pays sans même nous obliger à vivre dans une réserve.

Give them independence and give us complete independence from them . No more handouts to fund programs other provinces don't have . I've been listening to these traitors my whole life and I'm sick of it . Kick that traitor of a party out of our parliament while were at it ...Quebecois means = Anti Canadian ...Separatist should be hung for treason to the country !

Oui pendons les 2 millions et demi de séparatistes qui ont osé voter oui au référendum de 1995, ça relancera l'industrie du chanvre !

Ah que tout ça fleure bon le Canada !

17 mars 2011

Étrange

C'est une chanson de Brel assez épouvantable. Pour les gens de ma génération elle est rédhibitoire. Mais pour qui ? Il est normal qu'un mécanicien sache Brel.
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7 mars 2011

LA tempête

Il sera finalement tombé quelque chose comme 60 à 70 cm de neige depuis hier soir. On pourrait dire qu'à part la fermeture à peu près complète de la ville, cette tempête s'est bien passée.
Petit état des lieux dans mon coin, à la brunante.

Où l'on voit qu'au jardin, à défaut de clématites, on a de la neige grimpante en cette saison.

Où l'on voit que la tempête a donné des lignes nouvelles et nivodynamiques à la Subaru du locataire

Sous les névés les chars...

Une des rares bornes-fontaines qui émergent encore.

Raquetteur frimeur ayant oublié qu'à 17h 00 les télés sont retournées dans leurs studios. 

La côte King déserte à l'heure de pointe. Oui, oui, on en a une !

La neige donne des sourcils aux feux de circulation mais pas aux agents. 

Et pour terminer, un peu d'art public. Ultra Nan squatte un panneau inutile pour pas un rond.

Mais à la course au bonheur, j'ai préféré les courses tout court. On était huit clients dans l'immense maxi des Grandes Fourches. Tout le monde était heureux. Et tous les gens que j'ai croisés se saluaient. Curieux qu'il faille ce genre de circonstances pour qu'on sorte de la réserve ordinaire des urbains. Comme si la rupture d'un code météo entraîne celle des codes sociaux. 
Pour le mieux, l'entraide.
À croire que la normalité la décourage. 

Et dire qu'il ne restera plus rien de tout ça dans un mois peut-être.

Relâche (s)

C'est une belle invention que la semaine de relâche, surtout si comme aujourd'hui un congé inespéré vient la prolonger un peu. La cause du congé est assez évidente:

Au moins 45-50 cm de neige de tombés au moment d'écrire ces lignes. Ma ville est à peu près fermée, le cégep, l'université, les services municipaux et la plupart des bureaux aussi. Les services d'urgences ont mis leurs 4x4 et leurs motoneiges disponibles pour les urgences. On voit que les leçons de la dernière grosse tempête a été retenue.  

Ce congé inattendu est d'autant plus précieux que j'ai moi aussi fait relâche la semaine dernière. Les piles de copies n'ont bougé qu'à la suite du grand ménage de mon bureau, je vais les corriger tantôt. J'en ai aussi profité pour lire un peu, me commander un nouveau lit, l'ancien ira meubler la chambre d'amis finalement vidée par ma nièce. J'ai songé à repeindre ma chambre mais comme il faudra de toutes façons en changer la fenestration et refaire les murs, aussi bien attendre les grandes rénos prévues pour d'ici deux ou trois ans. 

J'ai fait un saut à Montréal voir ma mère qui s'est bien remise de son opération. Je suis même content de voir que ma soeur qui habite avec elle a enfin commencé à comprendre que les tâches ménagères étaient devenues trop lourdes pour ses 82 ans. J'aime bien jaser avec ma mère de sa jeunesse en Gaspésie,  au temps des chevaux et des lampes à l'huile. Grande pauvreté mais richesses humaines. Elle m'a raconté que mon grand-père entretenait toujours des conteurs à sa boutique de forge pour faire patienter ses clients. Autre époque... 

 J'ai profité de ma visite en ville pour aller voir l'expo des guerriers chinois au Musée des Beaux-Arts avec mon vieil ami Michel. Impressionnante toujours cette grande et vieille civilisation si étrangère à la nôtre par ses rites ses croyances. L'expo est bien mise en scène et comme on l'a visitée sur l'heure du souper, on a pu éviter la cohue. On a erré un peu aussi dans les salles permanentes où mon ami a pu exercer sa nouvelle passion de photographe.

Je pense qu'il est pas mal plus doué que je ne le suis...

J'en ai ramené trois petits guerriers qui trônent maintenant au dessus de mon bureau. 

C'est le prix des trois paquets de cigarettes que je n'ai pas fumés depuis vendredi ;-)