27 avril 2006

Histoires

Grosse manchette du Devoir sur l’édulcoration des programmes d'histoire au Québec. À lire l’article de Robitaille on veut verser dans le politiquement correct et éviter de trop mettre l’accent sur les conflits, notamment entre francophones et anglophones. C’est évident que l’histoire se réécrit toujours. On sait à quel point elle participe à la construction des nations, ou du moins de leurs imaginaires collectifs.


Pour ma part c’est effectivement par le cours d’histoire Canada-Québec que le trudeauiste que j’étais est devenu souverainiste. Non pas tant que mon prof ait été militant, mais disons que la mauvaise foi britannico-canadienne revient tellement souvent qu’on ne peut que tirer les conclusions qui s’imposent. Au fond, c’est normal aussi quand on a été colonisé de ne pas trop aimer la culture du colonisateur, et ça explique autant la méfiance envers les Anglais que la trouble relation Québec-France dont parlait le Devoir de samedi dernier.

Ce n’est pas mauvais en soi que l’histoire du Québec soit un peu ethno-centrée, après tout s’il existe un cas québécois cela vient précisément de cet acharnement étrange à vivre en français en Amérique. Encore qu’on devrait plutôt parler d’une histoire linguo-centrée puisqu’on trouvera toujours dans l’arbre généalogique d’un québécois de souche un irlandais, un anglais, un écossais, un allemand, un acadien et plus d’amérindiens qu’on ne le croit généralement. Et encore là, la souche français est assez diversifiée elle aussi : le premier ancètre du coté de ma mère était breton, poitevin du côté paternel. Il aurait pu être gascon, basque, normand, picard ou parisien.

Au fond, la ceinture fléchée était un beau symbole. Pure laine. Mais de brins de toutes les couleurs.

17 avril 2006

Sainte Toutoune et les oies

Des fois les meilleurs tours de machines sont ceux où on part sans trop savoir où on va et surtout comment on y arrive. Ça été le cas dimanche dernier quand mon vieil ami Daniel est passé me prendre chez ma mère sur la rive sud. Photographe accompli, il avait la vague idée d’aller voir la migration des oies blanches. Mais nous avons dérivé. Vers Saint-Amable tout d’abord, village mythique et perdu de la rive Sud. C’était un de ces coins pauvres du Québec, nid de quêteux de magouas et de chaouins, comme Saint-Gervais dans le bout de Bellechasse. Il y a 20 ans c’était la capitale des dépotoirs plus ou moins légaux de la Rive Sud de Montréal. C’est devenu la capitale de l’asperge locale et une banlieue banale. La surprise venait après. A Sainte-Toutoune.

Sainte-Toutoune, c’est le surnom local de Sainte-Théodosie, petit village perdu entre Verchères et Saint-Marc-sur-Richelieu. Le vrai nom de ce village est en fait devenu Calixa-Lavallée, du nom de l’auteur de la musique du O Canada. Pas sûr qu’il ait gagné au change.

Mais ce qu’il n’a pas perdu c’est sa richesse architecturale. Le village est sans doute un des mieux conservés du Québec. Il a à peine été modernisé. Nous nous sommes arrêtés évidemment à l’église, une des rares encore entourée par le cimetière, selon la vieille coutume.

A coté il y avait cette vieille maison de la fin du XVIIIe, à l’œil. Cela se voit au solage peu élevé de terre et à la fenestration asymétrique. Elle est évidemment accompagnée de sa cuisine d’été en bois et d’une grange ancienne.










Pendant que Daniel mitraillait le secteur avec sa caméra gros calibre un type s’approche de lui et lui demande s’il vient d’un quelconque ministère. Ce qui entame la conversation et le mec nous invite à voir sa boutique de forge qu’il a reconstituée. Mon grand-père était forgeron de village alors j’étais curieux de voir ce lieu qui nous était toujours interdit, étant jeunes.

Il y a d’abord un attirail impressionnant, résultat de quelques successions. Le gars a décidé dans le fond de maintenir en vie un métier qui se perd. C’est son passe-temps. Il fait partie d’une association qui s’est donné comme but de préserver ce patrimoine immatériel que sont les métiers anciens. Parmi ses trésors, il y a une série de moules de toute sortes dont un à crucifix :











Et cette curieuse version d’un tableau connu :


Et on est finalement repartis, munis d’une grosse cuillère en étain à motifs amérindiens sortie d’un moule du début de la colonie peut-être.

Le rang de la Beauce qui suit le village est sans doute la plus grande concentration de maisons de pierres que j’aie vue au Québec et les bâtiments de ferme sont anciens aussi. Sans doute une des plus beaux paysages ruraux profonds du Québec, un des mieux préservés sûrement, il est maintenant heureusement classé.

Et les oies ? On les a vues, mais ce sera pour une prochaine fois.

16 avril 2006

Rien de Pâques

Toute la journée a été grise, novembresque, mais au moins deux fleurs dans le jardin ; une sauvage, le tussilage, vraie première fleur à pousser ici et des primevères revenues de l’an dernier. Les tulipes poussent, le gazon verdit.

Je n’ai pas trop la tête à bloguer, emmêlé que je suis dans ma tête et mes cv. J’ai des goûts de grand ménage, de boîtes même. Je sens une page qui tourne. Un détachement qui se fait tranquillement aussi. L’intuition est bonne pour le moment. Mais encore trop de choses sont possibles. Éclaircies en vues malgré tout.

Ainsi qu’un tour de machine à écrire et des impressions de Trois-Rivières à noter dès que ma caméra débogue.

12 avril 2006

Première veillée

Aujourd’hui temps presque chaud. Première presque journée d’été. Le soleil est parti la pluie s’en vient. Suis arrivé de Montréal ce midi, je viens de passer deux heures à nettoyer le jardin. Il vente un peu mais l’air est doux et les oiseaux entament leur concert du soir.

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Je suis revenu de Trois-Rivières hier, encore plus perplexe que quand je suis parti. Mon contact là-bas m’a plutôt suggéré un sujet nouveau, plus près de la géographie physique que de l’humaine. Ce n’est pas trop dans mes cordes mais peut-être plus court à réaliser que ce à quoi j’avais pensé. Le contact a été très sympathique. Par contre, les locaux de l’UQTR ressemblent à un gros cégep, dans le style carcéral des années 1970.

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Mes nombreux déplacements en bus m’ont permis de lire Le cœur éclaté de Tremblay. Une belle histoire. J’ai mieux compris le génie de sa langue. Elle est québécoise à tel point que les dialogues qui se passent à Key West, qu’on imagine en anglais, sont traduits en québécois de Tremblay qui est une savante notation. On serait curieux de lui faire traduire Kérouak, c’est une langue plus amériquaine que celle du VIe arrondissement de Paris.

En ce sens, le faux débat sur Tremblay, bien rendu chez Laurent, me semble plus refléter la profonde nullité des grands médias québécois. On fait une montagne probablement parce que le journaliste québécois moyen ne l’a jamais lu. Ou compris. Parce que le journaliste québécois moyen est expert ailleurs. Ainsi RDI a été bien déçue de ne pouvoir faire son émission spéciale sur le libération conditionnelle de Guy Cloutier. On a du paniquer dans salles de rédaction sur le non événement qui en devient forcément un puisqu’on en parle.

Pendant ce temps, il y avait combien d’autres procédures semblables au Québec ?

Décidément, le téléjournal est devenu un très mauvais téléroman.

7 avril 2006

Chaouin ?

L’activité bloguante doit être inversement proportionnelle aux préoccupations du blogueur. Bien des choses en réflexion, démarches et autres en vue. En fait, je ne suis pas tant occupé que préoccupé. Je n’aime pas le changement mais il est inévitable, je crois. Entrevue lundi sur le projet de doctorat. Exploration concomitante de Trois-Rivières, éventuelle nouvelle ville cet automne ? Et tiens c’est vrai un magoua ça vient de Trois-Rivières non ?

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Par ailleurs, mon loyer n’est plus compatible avec la chute de mes revenus. Cela rend la relocalisation inévitable à court terme. Mais, compte tenu de mon sujet de doctorat et des revenus d’emploi possibles, ce serait utile de garder un pied-à-terre à Sherbrooke? Comment ?

Et puis, hier quelqu’un a glissé dans mon casier une offre d’emploi. Remplacement d’un an d’un prof dans mon domaine. À Winnipeg. Ça m’a fait rêver un peu. Partir un an dans la splendeur du Manitoba. Boulot payant sûrement. Peu de candidatures vraisemblablement. Mais Winnipeg! Ça prend un passeport pour aller là ? En tout cas, paraît que les nuits y sont longues.

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Je pars pour la banlieue profonde de Montréal demain. Vais voir ma famille là-bas ce qui m’aidera sans doute à démêler mes idées. J’en ai besoin je pense. J’y aurais bien pris une bière avec le capitaine mais il recevait jeudi, et le jeudi je suis de permanence aux Beaux Dimanches. Suis bien touché qu’il m’ait mis dans sa blogoliste, ça incite à continuer. Et à mettre à jour la mienne aussi.

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Mais là encore, possible que le magoua s’enchaouinise bientôt. Je songe en effet à une mutation de ce blogue. Un nouveau titre en tout cas. L’esprit chaouin. On peut jouer au magoua à Sherbrooke mais à Trois-Rivières le mot a un sens tout autre. Le chaouin est une manière de magoua, mais du piémont appalachien. Mon vieux chum Boisvert a écrit un livre là-dessus. Le texte d’ouverture s’intitule L’esprit chaouin préféré à la pensée niaiseuse. On lit ce début de poème :

Encombré d’altitudes sur des seuils captifs
les averses lui creusent la ride appalache.
Le monde d’abord étonne, mais il croule;
la braise westerne écarlate une lune intégrale
et, l’âme basse dans la distance qui l’étreint,
le mouton s’arrête.

Yves Boisvert, Les chaouins, XYZ/Le Sabord

Je pense que le mouton s’arrête pour voir quelque chose de neuf, dans mon cas.

À moins qu’il ne devienne un loup ?

1 avril 2006

Fin de parenthèse(s)

Fin de la parenthèse de presqu’été. Encore cet avant-midi j’avais trop chaud faisant mes courses en chandail de laine. Et hier petit apéro au jardin avec des amis. On en est pas aux doux soirs, il faisait 21 à 17h mais 6 à 20h. Quand même il y a quelque chose d’enivrant à suer en défrichant le jardin au gros soleil le 31 mars. Les bouteilles subséquentes l’ont d’ailleurs confirmé.

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Mes démélés académiques se sont soldés par une ultra solution : le cours est annulé. Tout le monde y perd, mais l’honneur est sauf. Un câble de moins qui me retient ici. Du boulot à trouver aussi. Et direction Trois-Rivières ?

Il y a un pont à traverser.