L’intervention des lucides sous la houlette de Lucien ne manque pas de bon sens. Que le vieillissement de la population du Québec soit inquiétant est un thème constant de mes cours de géographie idoines, d’autant plus qu’il frappe plus dur en zones rurales et en régions. Que le Québec soit trop endetté, je veux bien le croire, l’étant moi-même, je sais combien c’est inconfortable en cas de coup dur. Qu’on veuille revaloriser l’éducation m’enchante, quoique je pense que c’est autant une question valeurs que de moyens…
Je trouve quand même curieux tout ce battage médiatique autour d’un manifeste qui n’est somme toute qu’une liste d’épicerie de débats à mener rédigée par des outsiders du monde politique. Cela dit, ce n’est pas mauvais de brasser la cage autour de certaines idées reçues, d’autant plus que les réactions à ce propos ont été tellement prévisibles, Charest et Dumont y repêchent leurs idées de droite, la gauche institutionnelle rejoue son refrain contre le néo libéralisme.
Par sa neutralité sur la question nationale on a voulu ratisser large, mais force est de constater que beaucoup de solutions aux questions posées échappent en partie au pouvoir québécois, ne serait-ce que par ce nerf de la guerre qu’est la fiscalité. Quand la moitié des revenus des taxes et impôts provenant du Québec sont gérés à Ottawa, il y a plusieurs mains sur le volant…
Dans le fond, le but de cette manœuvre est d’effaroucher quelques vaches sacrées du décor québécois. Le cas des frais de scolarité universitaires est exemplaire à cet égard. Va sans dire que les étudiants sont contre une augmentation et qu’il sera impossible de les convaincre. Doit-on pour autant hurler au corporatisme ? On le fera à droite. Va sans dire aussi que des frais de scolarité peu élevés sont un obstacle de moins à l’accession aux études supérieures. Est-ce que ça permet l’arrivée des pauvres à ces sommets ? Que je sache l’université québécoise demeure surtout fréquentée par les classes moyennes supérieures qui marchent dans les traces de leurs parents. Pour trancher au-delà de l’impression, j’aimerais bien mettre la main sur des données sociologiques comparatives entre les universités chères de l’Ontario et les universités moins chères du Québec.
De même, la place du privé dans les services publics est toujours une question qui se pose. Là aussi les dogmes des libéraux ou des étatistes ne tiennent pas la route. Dans la gestion de l’eau potable, les expériences de privatisation sont rarement concluantes. Par contre, je ne suis pas sûr que les monopoles syndicaux dans les services alimentaires ou d’entretien des hôpitaux soient un succès.
Par contre, les propositions de changement dans la fiscalité m’inquiètent plus. Augmenter les taxes ou les frais des services publics comme l’électricité et diminuer d’autant l’impôt sur le revenu c’est favoriser les plus riches puisque les taux d’impôts augmentent selon les revenus. À moins bien sûr d’avoir des tarifs d’électricité modulés selon les salaires…
En un mot, ce manifeste de la lucidité ne règlera rien. Toujours on voudra un maximum de services gratuits de l’État et toujours on n’aimera pas en payer le prix par les impôts. Le bon citoyen aimera toujours acheter chinois moins cher chez Wal-Mart et demander en même temps une augmentation à son patron pour produire les mêmes bébelles à gros prix. Toujours on hurlera contre les inégalités et toujours on se taira quand elles nous favorisent.
Par manque de lucidité.
La lucidité se tient dans mon froc.
C’est connu.
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